Se rémunérer intelligemment à l’international : dividendes, management fees, royalties, stock-options
La mondialisation des affaires offre aujourd’hui aux entrepreneurs et dirigeants de PME/ETI de multiples leviers pour optimiser leur rémunération. Entre dividendes, management fees, redevances (royalties) ou plans d’actions (stock-options, BSPCE, actions gratuites), il existe des stratégies légales permettant de réduire la charge fiscale et sociale tout en demeurant en conformité.
FISCALITÉ INTERNATIONALEOPTIMISATION FISCALE
La mondialisation des affaires offre aujourd’hui aux entrepreneurs et dirigeants de PME/ETI de multiples leviers pour optimiser leur rémunération. Entre dividendes, management fees, redevances (royalties) ou plans d’actions (stock-options, BSPCE, actions gratuites), il existe des stratégies légales permettant de réduire la charge fiscale et sociale tout en demeurant en conformité. Ce dossier, à vocation pédagogique, fait le point sur les formes de rémunération courantes à l’international et leur fiscalité en France, illustre des montages optimisés et compare plusieurs juridictions attractives. L’objectif est d’armer les dirigeants – résidents fiscaux français fortunés ou à hauts revenus – de connaissances claires pour structurer une rémunération efficace, légale et pérenne à l’international.
Les différentes formes de rémunération des dirigeants (sauf salaire)
Les dirigeants et associés disposent de plusieurs moyens de se rémunérer au-delà du salaire classique, en particulier lorsqu’ils opèrent via des structures internationales. De manière très générale, voici les principales formes de rémunération utilisées :
Dividendes
Les dividendes sont des distributions de bénéfices aux actionnaires. Un dirigeant-actionnaire peut se verser une partie des profits de sa société sous forme de dividendes, généralement en fin d’exercice. À l’international, il est possible de percevoir des dividendes depuis une filiale ou holding étrangère. L’attrait des dividendes tient à leur taxation souvent plus douce que le salaire (pas de cotisations sociales salariales, imposition forfaitaire en France). Ils doivent toutefois provenir de bénéfices distribuables et respecter les règles locales (par exemple, certaines juridictions offrent des régimes d’exonération sur les dividendes intragroupes).
Management fees (frais de gestion)
Les management fees sont des facturations de prestations de gestion ou de services administratifs entre sociétés liées. Concrètement, un dirigeant peut créer une société de management (souvent dans un pays étranger à fiscalité avantageuse) qui facture des services (stratégie, conseils, gestion…) à sa société d’exploitation. La société de management encaisse ainsi des revenus, déductibles du résultat de la filiale opérationnelle. Ce montage permet de remonter des fonds au niveau de la holding de gestion.
Attention : ces prestations doivent correspondre à une réalité économique (services réels rendus et facturés à prix de marché), sans quoi l’administration fiscale peut contester la déduction. En effet, pour être déductibles, les management fees doivent être dans l’intérêt de la filiale, correspondre à un service effectif, ne pas pouvoir être accompli en interne et être rémunérés de manière non excessive. À défaut, le fisc peut refuser la charge, la requalifier en distribution cachée de bénéfices et appliquer des redressements.
Redevances de propriété intellectuelle (Royalties)
Les redevances ou royalties sont des rémunérations versées en contrepartie de l’utilisation d’un actif immatériel (marque, brevet, logiciel, savoir-faire…). Un dirigeant détenteur d’une propriété intellectuelle peut la licencier à sa société via un contrat de licence, percevant ainsi des royalties. À l’international, on voit souvent des montages où l’IP (Intellectual Property) est logée dans une entité étrangère (par exemple en Irlande, Luxembourg ou aux Pays-Bas) qui facture des redevances à l’entreprise opérationnelle. Les royalties permettent de transférer une partie du profit vers la structure qui détient l’IP. Cela peut être fiscalement optimisant si la juridiction de la société qui perçoit les royalties offre un taux d’imposition réduit sur ces revenus (voire aucune imposition si la structure est offshore). Comme pour les management fees, il est essentiel que le niveau des royalties soit justifié (valorisation de l’IP et taux de redevance de marché), sous peine de requalification en transfert de bénéfices abusif.
Stock-options, BSPCE et actions gratuites
Les plans d’actions sont des outils permettant au dirigeant ou à ses collaborateurs de gagner sur la valorisation de l’entreprise plutôt que via un revenu immédiat. Ils regroupent notamment :
Stock-options classiques : droit d’acheter des actions à un prix fixé, permettant une plus-value en cas de hausse de la valeur.
BSPCE (Bons de Souscription de Parts de Créateur d’Entreprise) : stock-options spécifiques aux start-ups françaises, réservés aux salariés et dirigeants de jeunes entreprises innovantes. Ils offrent un régime fiscal avantageux sur la plus-value réalisée à la revente des actions sous-jacentes.
Actions gratuites (AGA) : attribution sans frais d’actions au bénéficiaire, avec une période d’acquisition et de conservation minimale.
Ces instruments, très utilisés pour attirer et fidéliser les talents, permettent de convertir la croissance de valeur de l’entreprise en gain personnel. Le dirigeant peut ainsi espérer un gain important (taxé en capital et non en salaire) si l’entreprise prend de la valeur. Toutefois, la fiscalité de ces dispositifs est spécifique et a connu des durcissements récents en France. Une réforme de 2025 a ainsi précisé que les gains issus de management packages (stock-options, BSPCE, etc.) sont par défaut imposés comme des salaires, sauf conditions strictes remplissant un véritable risque capitalistique. En clair, si l’avantage accordé au dirigeant tient plus de sa qualité de salarié/mandataire que d’un investissement réel, le gain sera taxé en traitement et salaire (imposition beaucoup plus lourde) Il est donc crucial de respecter scrupuleusement les conditions légales de ces plans (durée de détention, prise de risque, etc.) pour bénéficier du régime favorable des plus-values.
Tour d'horizon en France
En tant que résident fiscal français, un dirigeant est imposable en France sur ses revenus mondiaux (sous réserve des conventions fiscales internationales). Chaque type de revenu décrit ci-dessus obéit à un régime fiscal particulier en France, qu’il convient de connaître avant de mettre en place une stratégie de rémunération internationale. Faisons donc le point sur l'imposition des différents types de prestation en France.
Dividendes : PFU, IR et prélèvements sociaux
Les dividendes perçus par un contribuable français – qu’ils proviennent d’une société française ou étrangère – sont soumis au Prélèvement Forfaitaire Unique (PFU) de 30% par défaut. Ce taux forfaitaire global se décompose en 12,8% d’impôt sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux (CSG-CRDS). Il s’applique automatiquement, sauf si le contribuable opte pour le barème progressif de l’impôt sur le revenu. En cas d’option pour le barème, les dividendes bénéficient alors d’un abattement de 40% sur leur montant brut imposable, puis sont ajoutés aux autres revenus du foyer et taxés au taux marginal, avec en sus les prélèvements sociaux de 17,2%. Cette option n’est avantageuse que si le foyer est dans une tranche d’imposition moyenne inférieure.
Attention cependant à la taxe PUMa (6,5%) qui s'ajoute si vous n'avez pas de revenus soumis à cotisations sociales !
Cas particulier des SARL : pour les gérants majoritaires de SARL/EURL affiliés au régime TNS, la loi soumet aux cotisations sociales une fraction des dividendes perçus. En effet, la part des dividendes annuelle qui excède 10% du capital social + apports en compte courant + primes d’émission est réintégrée dans l’assiette des cotisations sociales du gérant. Autrement dit, au-delà de ce seuil, les dividendes sont frappés des charges sociales (~45%) comme un revenu d’activité, en plus d’être fiscalisés. Cette mesure incite de nombreux dirigeants à adopter le statut de SAS (où ce dispositif ne s’applique pas et les dividendes ne supportent que les prélèvements sociaux de 17,2%). Il convient donc de veiller au statut de la société distributrice et à la réglementation sociale applicable aux dividendes.
En somme, les dividendes offrent un cadre fiscal généralement favorable (PFU 30% maximum), notamment pour les dirigeants fortement imposés sur le revenu. Ils permettent d’éviter les cotisations sociales salariales sur des montants significatifs. Toutefois, ils restent soumis aux prélèvements sociaux et, s’ils proviennent de l’étranger, peuvent avoir subi une retenue à la source dans le pays d’origine (généralement imputable sur l’impôt français dans le cadre des conventions fiscales).
Management fees et rémunérations de prestation
Si un dirigeant perçoit une rémunération via des management fees, la fiscalité dépend de la structuration :
Facturation directe en nom propre : le dirigeant qui facture des honoraires de conseil/management à sa société devra déclarer ces revenus en tant que BNC (bénéfices non-commerciaux) ou traitements et salaires selon son statut. En pratique, s’il est gérant non salarié, cela peut être assimilé à un revenu professionnel, soumis au barème de l’IR et aux cotisations sociales des indépendants. L’avantage est d’éviter les charges sociales salariées et patronales d’un salaire classique, mais le taux global d’IR peut rester élevé.
Via une société de management (Manco) : c’est la société (souvent à l’étranger) qui encaisse les management fees, en payant éventuellement l’impôt sur les sociétés local sur son bénéfice. Si le dirigeant ne se verse pas immédiatement tout le profit, celui-ci peut s’accumuler dans la Manco à un taux d’IS potentiellement moindre qu’en France. La fiscalité française intervient lorsque le dirigeant rapatrie les fonds : par exemple, sous forme de dividende de la Manco (imposé au PFU 30% en France, après éventuellement une retenue à la source étrangère). Ce schéma interpose donc une couche d’IS étrangère et permet souvent de décaler ou atténuer l’imposition personnelle. Cependant, attention à l’abus de droit : si la société de management n’a pas de substance réelle (pas de véritable activité, ni de dépenses, ni de personnel en dehors du dirigeant), le fisc pourra y voir un montage artificiel visant uniquement à éluder l’impôt. De plus, pour la société française, les factures de management doivent respecter les conditions de pleine concurrence comme évoqué plus haut, sous peine de redressement (non-déductibilité des charges, requalification en distribution occulte).
En résumé, les management fees peuvent transformer une partie des rémunérations de dirigeant en charges déductibles pour la filiale française et en bénéfices dans une structure étrangère. Fiscalement, cela permet de mutualiser des profits dans un véhicule soumis à un impôt possiblement réduit, puis de choisir le moment et le mode de distribution à la personne physique. La France imposera in fine le dirigeant sur ce qu’il perçoit (dividendes, salaires de la Manco…), mais entre-temps l’optimisation tient au différentiel de taux d’IS et au décalage d’imposition. Il faut toutefois une vigilance juridique pointue pour ne pas tomber dans les travers de la simulation.
Redevances (royalties)
Pour un résident français, les redevances perçues constituent des revenus imposables selon leur nature :
Si elles proviennent de la propriété industrielle (brevets, inventions) ou droits d’auteur, elles peuvent être déclarées en traitements et salaires (si c’est un lien salarial) ou en BNC. Il existe parfois des abattements forfaitaires pour droits d’auteur, mais généralement un dirigeant qui licence un actif qu’il détient personnellement verra ces royalties imposées au barème de l’IR, potentiellement dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ou BNC selon les cas.
Si les redevances sont encaissées par une société étrangère qu’il contrôle, la situation rejoint celle des management fees via une Manco : la société paye l’impôt local sur les royalties nettes, et le dirigeant n’est imposé que lors du rapatriement (dividende, rémunération). Fiscalement, loger son IP dans une holding à l’étranger permet souvent de bénéficier de régimes d’amortissement fiscal ou d’exonération partielle des revenus de licence. Par exemple, l’Irlande offre un taux de 12,5% sur les revenus d’exploitation d’IP et autorise l’amortissement des actifs incorporels, le Luxembourg dispose d’un régime favorable pour les revenus de propriété intellectuelle (bien que réduit ces dernières années), etc. Si la structure étrangère est située dans un pays à imposition très faible (paradis fiscal), le dispositif « CFC » de l’article 123 bis du CGI français peut toutefois s’appliquer : il vise à taxer chaque année le résident français sur les bénéfices d’une entité qu’il contrôle dans un pays à fiscalité privilégiée (imposition < 50% de celle de la France), sauf à démontrer que l’entité y exerce une activité économique réelle. Ce mécanisme anti-abus empêche de capitaliser indéfiniment des revenus non taxés à l’étranger pour un résident français.
En France, les royalties rapatriées à titre personnel (par exemple, si la société étrangère verse un dividende alimenté par des royalties) seront soumises au PFU 30%. S’il s’agit de royalties perçues directement, elles intègrent le revenu imposable du dirigeant (barème IR + 17,2% prélèvements sociaux). Il n’existe pas de PFU spécifique pour les redevances comme c’est le cas pour les dividendes ou intérêts.
Plans d’actions : fiscalité des stock-options, BSPCE et AGA
Les dispositifs d’actionnariat salarié/dirigeant obéissent à des régimes fiscaux spécifiques, souvent plus favorables que des salaires, mais plus complexes. Voici les grandes lignes pour un résident français :
Stock-options (plans classiques) : Au moment de l’exercice de l’option (achat des actions à prix préférentiel), si le plan est qualifié et respecte les conditions, il n’y a pas d’imposition immédiate. C’est au moment de la cession des actions que le gain d’option (différence entre le prix de vente et le prix d’exercice payé) est imposé. Avant 2022, ces gains étaient souvent traités en plus-value mobilière (flat tax 30%). Désormais, la loi a introduit une distinction : si le gain réalisé dépasse un certain seuil et que l’avantage procuré résulte principalement de la position de salarié (management package sans véritable risque), la fraction excédentaire peut être requalifiée en salaire. En pratique, pour les stock-options attribuées après 2018, le régime actuel tend à imposer une partie des gains comme du salaire lorsque les conditions d’un véritable investissement à risque ne sont pas réunies. En dessous des seuils ou si les conditions sont respectées, le gain reste imposé à la flat tax 30% (12,8% + prélèvements sociaux).
BSPCE : Ils bénéficient d’un régime très incitatif en France. Le gain réalisé lors de la vente des actions obtenues via BSPCE est imposé comme une plus-value mobilière. Depuis 2018 (loi PACTE), c’est généralement la flat tax de 30% qui s’applique, avec une distinction selon l’ancienneté :
Si le bénéficiaire a plus de 3 ans d’ancienneté dans l’entreprise au moment de la cession des actions, le gain est taxé à 30% (PFU).
S’il a moins de 3 ans d’ancienneté, le gain est taxé à 47,2%, c’est-à-dire le PFU 30% + une surtaxe correspondante à la CSG/CRDS non déductible. Ce régime maintient en réalité l’ancienne distinction (moins favorable aux départs rapides). Quoi qu’il en soit, même dans le pire cas, on reste sur une imposition en capital (pas de cotisations sociales comme un salaire).
Notons que le gain d’acquisition éventuel (différence entre la valeur des actions à l’exercice et le prix d’exercice) est également soumis au PFU ou barème selon les cas, mais ces détails dépassent le cadre introductif.
Actions gratuites (AGA) : Pour les actions attribuées depuis 2018, la fiscalité se fait en deux temps.
D’abord le gain d’acquisition (valeur de l’action à la date d’acquisition définitive) est imposé:
Sur la fraction < 300 000 € : au barème progressif avec 50% d’abattement, + prélèvements sociaux 17,2%. Cela revient à taxer cet avantage comme un revenu exceptionnel à taux réduit.
Sur la fraction > 300 000 € : comme un salaire, sans abattement, soumis au barème plein + prélèvements sociaux d’activité (~9,7%) + contribution salariale 10%. Au-delà de 300k€, l’addition fiscale devient donc très lourde (impôt pouvant aller à 45% + CEHR 4% + ~20% de prélèvements sociaux cumulés). Cette tranche haute vise à éviter des attributions trop massives aux dirigeants.
Ensuite, la plus-value de cession ultérieure des actions gratuites suit le régime des plus-values mobilières (PFU 12,8% + 17,2% sociaux) pour la part qui avait déjà été imposée comme gain d’acquisition. En clair, le coût d’acquisition à retenir est la valeur qui a été soumise à imposition au moment de l’attribution définitive.
En synthèse, les plans d’actions permettent d’obtenir une taxation de type capital sur une partie de la rémunération liée à la performance de l’entreprise. Le cadre fiscal français reste attractif (flat tax, abattements) jusqu’à un certain point, mais les récentes évolutions (loi de finances 2025 sur les management packages) montrent une volonté de l’administration de lutter contre les excès. Il est donc recommandé de faire auditer ces plans par un fiscaliste, surtout en contexte international (par exemple, si les options portent sur une société étrangère, il faudra considérer la convention fiscale, etc.).
Stratégies d’optimisation par la localisation des structures
Plusieurs stratégies d’ingénierie juridique et fiscale tirent parti de la localisation des structures juridiques à l’étranger. L’objectif est généralement de profiter de régimes fiscaux plus doux sur tout ou partie des revenus, sans que le dirigeant ne perde le bénéfice économique de ces revenus. Voici quelques montages fréquemment utilisés, dans le respect de la légalité lorsqu’ils sont correctement mis en œuvre :
Holding à l’étranger
Constituer une holding à l’étranger est une pratique répandue. Il s’agit de placer au sommet du groupe une société mère dans un pays à fiscalité attractive, qui détiendra les parts des filiales (par exemple la filiale opérationnelle en France). Les bénéfices peuvent ainsi remonter vers la holding sous forme de dividendes transfrontaliers. Beaucoup de pays offrent un régime de participation-exemption, c’est-à-dire une exonération des dividendes reçus de filiales sous certaines conditions (détention > 5 ou 10%, durée > 1 an, etc.). Par exemple, le Luxembourg permet à une société mère (société de participation financière, SOPARFI) de recevoir des dividendes de filiales étrangères en exemption totale d’impôt. La holding peut alors conserver les bénéfices, les réinvestir ou les rediriger ailleurs.
Pour un dirigeant résident français, l’avantage principal est l’effet de décalage et de maîtrise de la distribution : tant que la holding étrangère ne lui verse pas de dividende, il n’y a pas d’imposition personnelle en France. Les profits peuvent croître à l’abri de l’IS français (25%) dans un environnement parfois moins taxé. De plus, si le dirigeant décide un jour de s’expatrier fiscalement, il pourrait alors toucher les réserves de la holding à moindre coût.
Illustration : une PME rentable française pourrait être détenue par une holding luxembourgeoise. Les bénéfices de la filiale française (après IS 25%) remontent en exonération à la holding luxembourgeoise (directive mère-fille de l’UE, donc pas de retenue à la source en France et pas d’IS au Luxembourg sur les dividendes reçus). La holding accumule ces bénéfices net d’IS français (75% du profit initial) sans taxe additionnelle. Le dirigeant, en tant qu’actionnaire de la holding, choisit quand se verser des dividendes depuis Luxembourg. S’il le fait immédiatement, le Luxembourg appliquera une retenue à la source (généralement 15% standard, pouvant être réduite à 0% si participation >10% pendant >1 an, ou 15% selon la convention franco-luxembourgeoise). En France, il paiera le PFU 12,8% sur le dividende brut, en créditant l’impôt retenu. S’il diffère la distribution, la trésorerie reste investie via la holding. Ce montage, fréquent, est légal à condition que la holding ait une réelle substance (direction effective, comptabilité, éventuellement bureaux administratifs à Luxembourg) pour ne pas être considérée comme une coquille vide purement fiscale.
Management company (société de management offshore)
Une management company située à l’étranger peut facturer des services à une société française, transférant ainsi des bénéfices vers un pays à fiscalité plus clémente. Les pays choisis sont souvent ceux combinant taux d’IS faible et bonne image juridique. Par exemple, une société de conseil basée en Suisse (Genève ou Vaud) pourrait facturer des frais de siège ou de conseil stratégique à la filiale française. La Suisse ayant un taux d’IS autour de 14-15% dans certains cantons, les bénéfices y seraient moins taxés qu’en France (25%). De même, des sociétés de management aux Émirats arabes unis (Dubaï) ou à Malte peuvent absorber du résultat. L’optimisation vient du fait que la société française réduit son bénéfice imposable (donc moins d’IS 25% en France) et que la société étrangère bénéficie d’un impôt réduit (voire nul) sur ce même montant.
Néanmoins, cette pratique est surveillée de près par l’administration. Une holding animatrice qui facture des prestations doit prouver la réalité de son rôle (personnel, expertise, coûts propres). L’administration fiscale voit d’un œil suspicieux ces facturations intragroupe, craignant une surfacturation artificielle pour vider la base taxable en France. En cas d’abus avéré (ex. prestations fictives ou largement surévaluées), elle pourra réintégrer les sommes dans le bénéfice imposable français, et appliquer des pénalités. Il y a aussi un risque pénal si l’opération est trop grossière (éventuellement abus de biens sociaux si un dirigeant d’une SA/SAS fait payer indûment sa société au profit d’une entité qu’il contrôle).
Une précaution classique est de formaliser une convention de prestation de services détaillant la nature des services fournis par la management company, leur mode de calcul et justification. Il faut aussi que la société de management ait une véritable activité (des charges, des employés éventuellement, en tout cas autre chose qu’une boîte aux lettres).
En respectant ces conditions, localiser une société de management dans un pays à fiscalité modérée peut permettre de diminuer la base taxable en France en toute légalité, tout en offrant au dirigeant un véhicule pour couvrir ses frais professionnels à l’étranger ou capitaliser du revenu.
Licensing IP via une entité dédiée
Les revenus de propriété intellectuelle sont souvent mobiles et peuvent être logés où bon semble. Une stratégie consiste à transférer la propriété de brevets, logiciels, marques, etc., vers une entité implantée dans un pays au régime IP avantageux. Cette entité (souvent une filiale ou une holding du groupe) concède ensuite une licence d’utilisation à la société française, en échange de redevances périodiques.
Plusieurs pays ont mis en place des “IP Box” ou régimes favorables aux revenus de propriété intellectuelle :
Les Pays-Bas ont un “innovation box” taxant les revenus d’actifs innovants à un taux effectif bas (~7%).
Malte permet également des déductions sur revenus de l’IP dans certains cas, ou via son mécanisme de remboursement d’impôt.
Irlande : taux standard 12,5% sur revenus commerciaux, applicable aux royalties commerciales, avec en sus la possibilité d’amortir le coût d’acquisition de l’IP, ce qui peut annuler la base imposable pendant des années.
Suisse : depuis sa réforme fiscale de 2020, certains cantons ont introduit des patent box avec des réductions d’impôt locales sur les revenus de brevets.
En utilisant ces dispositifs, une entreprise peut faire en sorte qu’une bonne part de son profit soit versé en redevance à une entité moins taxée. Par exemple, une startup tech française pourrait vendre ses droits de propriété intellectuelle à une filiale en Irlande, qui facturera ensuite une redevance de 5% du chiffre d’affaires à la France. La France déduit cette redevance, économisant 25% dessus, tandis que l’Irlande taxe à 12,5% (voire moins net d’amortissement) ce montant. Résultat : globalement l’impôt sur cette part de profit est réduit par rapport à une situation 100% France.
Le dirigeant, en tant qu’actionnaire final, bénéficie indirectement de cette optimisation lors de la distribution des bénéfices de la structure IP. Mais il faut être conscient des risques de transfert indirect de bénéfices : l’article 57 du CGI permet d’écarter les redevances exagérées vers des entités liées situées hors de France (surtout hors UE) et de les réintégrer dans le bénéfice imposable français. Là encore, la clé est de justifier le montant économiquement (par exemple via une évaluation indépendante de la propriété intellectuelle, ou en montrant que le taux de redevance est dans la norme du secteur).
Panorama comparé de quelques juridictions stratégiques
Chaque pays a ses propres règles fiscales. Voici un tour d’horizon de six juridictions prisées par les entrepreneurs pour structurer leur rémunération internationale, avec leurs atouts et points d’attention :
Luxembourg
Le Luxembourg est réputé pour ses sociétés holdings (Soparfi) et son environnement pro-business au cœur de l’UE.
Impôt sur les sociétés : ~24,94% (taux 2025 pour les bénéfices > 200k€, incluant l’impôt communal à Luxembourg-ville). Toutefois, les holdings purement passives payent peu d’IS car le régime de participation exemption exonère les dividendes reçus de filiales qualifiées et les plus-values de cession de titresey.com. Elles sont soumises en contrepartie à un impôt sur la fortune minimum (généralement 4 815 € par an).
Dividendes sortants : retenue à la source de 15% sur dividendes versés à des personnes physiques non résidentes. Une convention fiscale (France-Luxembourg) réduit souvent ce taux (à 15% standard, donc pas de gain sur la retenue). En pratique, si un dirigeant français perçoit un dividende de Luxembourg, il subira 15% retenu là-bas et 12,8% (PFU) en France, avec crédit d’impôt de 15%, ce qui couvre intégralement l’impôt sur le revenu français (12,8% < 15%, l’excédent de crédit pouvant être remboursé ou imputé sur les prélèvements sociaux). Les prélèvements sociaux 17,2% restent dus sur le net perçu.
Atouts : stabilité juridique, accès aux directives UE (mère-fille, intérêts et redevances, fusions), vaste réseau de conventions fiscales. Le Luxembourg est idéal en tant que plaque tournante : pour remonter des bénéfices sans frottement fiscal et les réinvestir internationalement. De nombreux groupes français y logent leur holding internationale.
Attention : depuis les directives européennes ATAD, le Luxembourg a dû introduire des clauses anti-abus (GAAR) pour refuser les avantages fiscaux aux montages purement artificiels. Il faut donc de la substance économique locale. Par ailleurs, une holding luxembourgeoise pilotée depuis la France pourrait être considérée comme ayant son siège effectif en France (donc imposable en France) si les décisions majeures sont en réalité prises depuis la France. Il est donc conseillé que le centre de management (réunions du conseil, etc.) se trouve effectivement au Luxembourg.
Irlande
L’Irlande attire les entreprises technologiques et pharmaceutiques du monde entier grâce à son impôt sur les sociétés de 12,5% sur les bénéfices commerciaux.
IS et régime IP : 12,5% sur les profits actifs (ce qui inclut les redevances commerciales). Un taux de 25% s’applique aux revenus passifs (certains revenus de location, etc.), mais dans le cadre d’une entreprise opérationnelle classique, c’est 12,5%. L’Irlande permet d’amortir fiscalement l’achat d’actifs incorporels sur 15 ans (ou durée d’utilisation), ce qui peut fortement réduire le bénéfice imposable si la filiale irlandaise a acquis des droits IP coûteux du dirigeant ou d’une société liée.
Dividendes sortants : en principe, retenue à la source de 25% sur dividende versé à un actionnaire individuel non-UE. Toutefois, un résident français peut bénéficier de la convention France-Irlande qui limite cette retenue à 15%. De plus, si la structuration est via une holding intermédiaire UE ou un fonds, il y a des moyens d’éviter la retenue (par exemple, l’Irlande n’applique pas de retenue sur dividende versé à une société mère située dans l’UE ou dans un pays avec lequel elle a une convention, tant que certaines conditions sont remplies).
Particularités : l’Irlande n’a pas de capital gains tax pour les sociétés sur la cession de titres de filiales éligibles (participation >5%, détenue >12 mois dans un actif commercial actif). C’est intéressant si la holding irlandaise revend une filiale étrangère : pas d’impôt de plus-value en Irlande, ce qui en fait un bon lieu de détention d’actifs à revendre.
Pour le dirigeant français : l’Irlande peut être un bon endroit pour loger des actifs immatériels (marques, logiciels) et bénéficier de la faible taxation des royalties et bénéfices. Toutefois, les distributions de dividendes vers la France seront imposées au PFU comme d’habitude. Le véritable gain réside donc surtout dans la compétitivité de l’IS (12,5%) et la possibilité de réinvestir les profits à moindre coût. D’un point de vue réputation, l’Irlande est considérée comme une juridiction “normale” et non un paradis fiscal, donc moins de risque d’image ou de listes noires.
Suisse
La Suisse est un cas particulier du fait de sa souveraineté cantonale en matière fiscale. Les taux d’imposition varient selon les cantons, mais suite à la réforme fiscale de 2020, la plupart des cantons ont sensiblement réduit leur IS pour rester attractifs (Genève ~14%, Zoug ~12%, Zurich ~19% en taux combinés).
Société en Suisse : Un dirigeant peut créer une SA ou Sàrl en Suisse pour fournir des services à son entreprise française (société de management) ou pour détenir des participations. L’IS peut y être très avantageux (par ex., ~14% à Genève). La Suisse n’a pas de régime holding aussi exemptant que le Luxembourg, mais elle exonère les dividendes perçus par une société suisse de ses filiales si participation >10% (participation relief) et elle ne taxe pas (ou peu) les plus-values de cession de filiales par une société.
Dividendes sortants vers individu : retenue à la source fédérale de 35%. C’est élevé, mais la convention fiscale franco-suisse permet au résident français de n’en supporter que 15% in fine (il doit généralement récupérer les 20% supplémentaires via une procédure de remboursement, et paie 15%). Ensuite, la France taxe au PFU en imputant le crédit de 15%. Au final, le dirigeant acquitte 30% français, dont 15% ont été prélevés en Suisse.
Spécificités sociales : Si le dirigeant choisit de s’établir physiquement en Suisse (cas de nombreux entrepreneurs “exilés”), il peut tirer parti d’un forfait fiscal dans certains cantons, ou simplement bénéficier de taux d’IR souvent plus bas qu’en France et d’une absence d’impôt sur la fortune. Mais notre cas ici est le résident français : celui-ci ne bénéficiera pas de l’IR suisse (il paiera en France sur ses revenus mondiaux), et s’il ne fait que créer une société suisse sans y résider, il ne pourra pas éviter l’imposition française. Donc l’intérêt de la Suisse pour un résident français est principalement au niveau de la société (faible IS sur les bénéfices).
Risques : La Suisse hors UE implique qu’il n’y a pas la directive mère-fille, donc les dividendes de France vers une holding suisse subissent 30% de retenue française (réduite à 0% seulement si >10% et engagement de conservation 2 ans, selon conv. franco-suisse). En outre, l’administration française peut considérer qu’une société suisse dirigée de fait depuis la France a un établissement stable en France ou est une société domiciliée en France. Il est donc impératif d’avoir une présence locale réelle (bureau, personnel).
En pratique : La Suisse est souvent choisie comme base de management ou de facturation de services, moyennant une substance sérieuse (un bureau et du personnel suisse qui exécutent les prestations). Les dirigeants valorisent aussi la stabilité juridique et la confidentialité suisses. Mais pour un pur montage fiscal, la Suisse est moins accommodante qu’avant, du fait de la vigilance française et de la fin du secret bancaire.
Estonie
L’Estonie est connue pour son système fiscal unique : taux d’IS de 0% sur les bénéfices réinvestis, et taxation à 20% seulement lors de la distribution des bénéfices (dividendes). En d’autres termes, tant qu’une société estonienne ne distribue pas ses profits, elle ne paye pas d’impôt sur les sociétés classique.
Fonctionnement : Chaque année, le bénéfice comptable n’est pas imposé. Lorsqu’un dividende est versé, l’entreprise applique un impôt de distribution de 20% (ou 14% si distributions régulières chaque année, un mécanisme introduit pour encourager des distributions stables). Ce 20% est calculé sur le dividende brut (par ex., un bénéfice de 100 distribué donnera 80 net et 20 d’impôt payé par la société).
Avantage : Cela équivaut à un report indéfini d’imposition tant que le profit reste dans la société. Pour un entrepreneur français, cela peut être intéressant pour capitaliser les gains sans subir immédiatement 25% d’IS + 30% de PFU. Par exemple, si une filiale estonienne réalise des prestations internationales, elle peut accumuler du capital sans impôt, qui pourra être réinvesti dans la croissance, l’achat d’actifs, etc.
Distribution vers la France : La convention France-Estonie prévoit une retenue à la source de 15% sur les dividendes versés à un résident français. Cependant, le prélèvement estonien de 20% sur la distribution n’est pas exactement une retenue à la source, c’est l’IS estonien (même s’il agit économiquement comme tel). Le résident français pourrait se voir accorder un crédit d’impôt correspondant à la retenue conventionnelle de 15%. En pratique, le schéma peut être complexe, mais disons qu’au final, le dirigeant français paiera approximativement 30% sur ce qu’il touche (avec un crédit pour éviter double imposition).
Risques et remarques : L’Estonie étant membre de l’UE, elle échappe aux listes noires de paradis fiscaux. Cependant, du fait du 0% sur bénéfices non distribués, une société estonienne contrôlée par un Français rentre typiquement dans le radar de l’article 123 bis (société à fiscalité privilégiée). Pour éviter l’imposition immédiate en France des bénéfices non distribués, il faut démontrer que l’entité exerce une activité réelle et principale en Estonie et que le montage n’a pas un but principalement fiscal. Cela peut être crédible si, par exemple, l’entreprise a une base de clientèle internationale, des employés en Estonie, etc. En revanche, une simple E-residency estonienne sans réelle implantation pourrait être considérée comme une coquille vide.
En résumé : L’Estonie est un choix innovant pour ceux qui souhaitent réinvestir leurs profits et différer l’impôt. Elle convient bien aux profils “nomades digitaux” ou aux startups internationales. Pour un dirigeant de PME française, l’usage peut être d’y loger une activité annexe ou nouvelle (par ex. une plateforme en ligne mondiale), plutôt que d’y transférer une activité française existante (qui serait trop visible).
Dubaï (Émirats arabes unis)
Dubaï, et plus largement les Émirats arabes unis, offrent un cadre quasi exempt d’impôts directs : jusqu’en 2022, il n’y avait ni impôt sur le revenu des personnes physiques, ni impôt sur les sociétés (sauf pour les compagnies pétrolières et banques). En 2023, les Émirats ont introduit un IS fédéral de 9%, mais de nombreuses zones franches continuent de garantir une exemption d’IS pour les entreprises qui n’exercent pas d’activité locale. Il n’y a toujours pas d’IR sur les particuliers.
Société en zone franche : Un entrepreneur peut établir une Free Zone Company à Dubaï ou Abu Dhabi, propriété à 100% étrangère, avec 0% d’IS garanti pendant 50 ans (renouvelables) à condition de ne pas faire de commerce dans le marché domestique émirien. Ces sociétés servent souvent de facturation de services internationaux ou de holdings de participations.
Dividendes et autres flux : Les Émirats n’appliquent pas de retenue à la source sur les dividendes, intérêts, redevances sortants. Ainsi, une société à Dubaï peut redistribuer librement ses bénéfices à son propriétaire non résident sans ponction fiscale locale.
Pour le résident français : sur le papier, Dubaï est le Graal – on peut y accumuler des bénéfices sans impôt local, et les rapatrier en France en ne payant “que” le PFU de 30%. Par exemple, au lieu qu’une prestation de conseil soit facturée en France (imposée 25% IS + charges sociales ou IR), elle pourrait être facturée par une société à Dubaï (0% d’IS), et le dirigeant ne déclarer en France qu’un dividende qu’il se verse, imposé 30%. Le gain semble énorme.
Risques majeurs : La France considère les Émirats comme un pays à fiscalité privilégiée (0% < 12.5% du taux français). Une société écran à Dubaï contrôlée depuis la France sera une cible évidente pour le fisc. Sans substance réelle (bureau, personnel sur place, activité véritable hors de France), le montage sera qualifié d’abusif. Le dirigeant risque un redressement avec application de l’article 123 bis (imposition des bénéfices non distribués comme s’ils étaient perçus) et possiblement une procédure pour fraude fiscale. Il y a eu de nombreux cas médiatisés de chefs d’entreprise sanctionnés pour avoir dissimulé des profits offshore. Par ailleurs, depuis 2019, la législation émirienne impose un “economic substance test” aux sociétés offshore pour prouver qu’elles ont une activité réelle aux UAE, sous peine de sanctions locales – preuve que même les paradis fiscaux doivent s’aligner sur les normes anti-évasion.
En clair : Dubaï convient surtout aux personnes prêtes à s’y installer (beaucoup d’entrepreneurs français s’expatrient à Dubaï pour ne plus être imposés du tout sur leurs revenus). Pour un résident français qui reste en France, utiliser Dubaï comme base de sa rémunération est extrêmement risqué, à moins d’avoir une structure multinationale complexe et justifiée.
Malte
Malte est un petit État de l’UE qui offre un système fiscal original : un taux d’IS standard de 35%, mais avec un mécanisme de remboursement partiel aux actionnaires étrangers, ce qui réduit fortement l’imposition effective.
Système du refundable tax credit : Lorsqu’une société maltaise distribue un dividende de bénéfices commerciaux à un actionnaire non-résident, ce dernier peut obtenir un remboursement d’impôt de 6/7e de l’IS payé. Par exemple, pour 100 de profit imposable, la société paye 35 de taxe à Malte, distribue 65. L’actionnaire reçoit un remboursement de 30 (6/7 de 35) de la part du fisc maltais. Au final, la société aura payé 5 net d’impôt (35 – 30 remboursés). L’actionnaire se retrouve avec 65 + 30 = 95 de bénéfice net sur les 100 initiaux. Ce mécanisme, pleinement légal, aboutit à un taux effectif d’environ 5% pour la plupart des activités (le remboursement est de 5/7e, soit taux effectif ~10%, pour les revenus passifs comme les intérêts et redevances, ce qui reste attractif).
Absence de retenue : Malte ne pratique pas de retenue à la source sur les dividendes versés aux non-résidents. Donc l’actionnaire français percevant les 95 n’a aucune retenue maltaise, il doit juste déclarer en France ce dividende.
Résultat pour le dirigeant français : Sur 100 de profit, on a ~95 distribuable, imposé à 30% en France = 28,5 d’impôt, il reste ~66,5 net. Comparativement, en France, 100 de profit auraient donné 75 distribuable après IS, puis 22,5 d’impôt PFU, reste 52,5 net. La structure maltaise procure donc un gain net appréciable.
Cadre d’utilisation : Beaucoup de sociétés de jeux en ligne, de paris, de commerce international utilisent Malte pour cette raison. Un dirigeant français pourrait interposer une holding maltaise pour détenir des filiales. Tant que les revenus proviennent de l’étranger, Malte les impose (puis rembourse) comme décrit. Notons que Malte exempte aussi les plus-values sur cession de participation (si détenue > 3 ans, >5%).
Prudence : Le schéma maltais est efficace mais visible. Il est connu de l’administration française. Là aussi, l’article 123 bis peut jouer si la société maltaise n’a pas de substance et que son impôt (5% effectif) est < la moitié de l’impôt français. Cependant, Malte étant dans l’UE, un contribuable peut tenter de plaider qu’il n’y a pas de but exclusivement fiscal et une activité réelle, ce qui rendrait 123 bis inapplicable (conformément à la liberté d’établissement). Il faut pour cela que la société maltaise ait un vrai rôle (holding animatrice ou prestataire de services dans un contexte international).
En résumé : Malte offre une optimisation légale inscrite dans la loi maltaise. Pour un entrepreneur international, c’est un moyen d’abaisser considérablement l’impôt sur les bénéfices. Pour un résident français, les bénéfices maltais doivent finalement revenir en France où ils seront taxés à 30%. Le montage reste intéressant surtout si l’on compare 5%+30% au lieu de 25%+30%. Mais la condition sine qua non est la réalité économique du montage (sinon gare à l’abus de droit).
JuridictionTaux d'ISParticularitésRetenue sur dividendes vers FranceRisques/NotesFrance (réf)25%–– (PFU 30% en France)Base de comparaisonLuxembourg24.94% (IS)Participation-exemption, impôt fortune15% (conv. France)taxsummaries.pwc.comSubstance requise (EU, stable)Irlande12.5% (IS)Taux réduit, amort. IP15% (conv. France)Image bonne (EU), ATAD GAARSuisse~14% à 19%Cantons variés, pas d’IR pers.
si expatrié15% (conv. France, après remboursement 20%)Hors UE, exige substanceEstonie0% (non distribué)
20% si distribuéIS différé jusqu’à distribution15% (conv. France)Ruling substance (EU), art.123 bis possibleDubaï (EAU)0% (zone fr.)
9% sinonPas d’IR, régime zone fr. 50 ans0% (pas de retenue EAU)Très risqué si résident FR (123 bis, abus)Malte35% (5% eff.)Remboursement 6/7e (effectif ~5%)0% (pas de retenue)Substance ++ (EU), art.123 bis potentiellement
(Tableau comparatif : Taux d’imposition des sociétés et traitement des dividendes pour un actionnaire français, par juridiction. Les taux d’IS sont indicatifs. Retenue = retenue à la source sur dividendes versés à une personne physique résidente française.)
Exemples chiffrés de stratégies de rémunération internationale
Examinons plusieurs scénarios simplifiés de rémunération d’un dirigeant (résident français), pour illustrer l’impact financier et le niveau de risque de chaque stratégie. Supposons une entreprise générant 100 € de bénéfice avant rémunération du dirigeant. On compare différentes manières d’extraire ces 100 € vers le dirigeant.
Salaire versé en France (référence) – Stratégie conventionnelle, risque nul
Mécanisme : L’entreprise verse 100 € de rémunération brute au dirigeant. En réalité, cela coûterait environ 145 € à la société en incluant ~45% de cotisations patronales, ce qui la mettrait en perte de 45 € (on suppose que l’entreprise ne paie pas d’IS, puisque le résultat devient nul ou déficitaire). Le dirigeant paie des cotisations salariales (~22%) sur 100 €, et l’IR selon sa tranche (45% marginal supposé).
Net perçu : Environ 100 – 22 – 35 = 43 € net (après impôt sur le revenu).
Coût global en impôts/charges : Très lourd. Sur 145 € de charge totale pour la société, le fisc et l’Urssaf en captent plus de 100 € (cotisations + IR + CSG).
Avantages : Protection sociale maximale pour le dirigeant (retraite, maladie), pas de redressement envisageable.
Inconvénients : Efficacité fiscale médiocre (prélèvements cumulatifs ~70%). Cette solution n’est optimale que pour des rémunérations modestes ou pour la partie de revenu nécessaire pour valider des droits sociaux.
Dividende d’une société française – Optimisation simple, risque faible
Mécanisme : La société paye l’IS sur 100 € (25%), il reste 75 € de bénéfice distribuable. Distribution en dividende au dirigeant.
Net perçu : Sur 75 €, le dirigeant paie le PFU 30% = 22,5 €. Net 52,5 €.
Coût global : 25 € d’IS + 22,5 € PFU = 47,5 € de prélèvements totaux. Le gain par rapport au salaire est net : presque 10 € de plus pour le dirigeant à partir de 100 € de profit (52,5 € vs 43 €). Le taux effectif d’imposition est ~47,5%.
Risques : Quasiment aucun tant que la distribution respecte le code des sociétés. Il faut juste faire attention, pour les SARL, à ne pas dépasser le fameux seuil de 10% du capital pour éviter les cotisations sociales TNSlecoindesentrepreneurs.fr. Mais sinon, c’est parfaitement légal et courant.
Remarque : De nombreux dirigeants se versent un “minimum salarial” (pour la protection sociale de base) et le reste en dividendes, profitant de ce différentiel de taxation.
Facturation via une holding étrangère (Luxembourg) – Optimisation internationale, risque modéré
Mécanisme : Une holding luxembourgeoise facture des management fees de 100 € à la société française. Celle-ci déduit 100 € de son résultat, économisant 25 € d’IS. La holding luxembourgeoise encaisse 100 €, supposons qu’elle supporte 5 € de coûts divers, bénéfice imposable 95 € à Luxembourg. IS luxembourgeois ~24,94% sur 95 € = ~23,7 €. Il reste 71,3 € après impôt dans la holding. Celle-ci verse en suite un dividende de 71,3 € au dirigeant. Luxembourg retient 15% = 10,7 €, le dirigeant reçoit 60,6 € en France et paie le PFU 12,8% sur 71,3 € (imputation du crédit de 15%). En pratique, l’impôt français sur le revenu est couvert par le crédit, restent les prélèvements sociaux 17,2% sur 71,3 € = 12,25 €.
Net perçu : Environ 60,6 € (le montant reçu après retenue de 15%) moins 12,25 € de sociaux = 48,35 € net.
Coût global : 23,7 € IS Lux + 10,7 € WHT Lux + 12,25 € sociaux FR = ~46,65 €. Efficacité similaire à un dividende France (un peu moins bonne ici en raison de la double imposition partielle). On aurait pu améliorer en ne distribuant pas tout de suite le dividende.
Risques : Modéré. Si la convention de management est bien faite et que la holding a de la substance (un vrai siège, etc.), le schéma tient la route. Le fisc pourrait contester si les 100 € facturés ne sont pas justifiés par des services réels. Mais en admettant que le holding rend effectivement des services (stratégie de groupe, financement…), c’est défendable. Attention toutefois à l’abus de droit si la seule motivation est fiscale. Un rescrit ou l’avis d’un conseil expérimenté est prudent.
Conclusion : Cette stratégie montre son plein intérêt si la holding capitalise le profit sur plusieurs années. Ici, on a tout distribué immédiatement, ce qui génère un frottement. Mais si la holding réinvestit les 71,3 € dans une nouvelle activité ou attend que le dirigeant soit non-résident pour distribuer, le gain peut être significatif. C’est donc surtout un outil de décalage et d’investissement international.
Licence de marque via une société maltaise – Optimisation agressive, risque modéré à élevé
Mécanisme : La société française verse 100 € de royalties à une société maltaise qui détient la marque du groupe. La France déduit 100 € (gain 25 € d’IS économisé). La société maltaise déclare 100 € de bénéfice, paie 35 € d’IS, reste 65 €. Elle distribue 65 € en dividende au dirigeant français, sans retenue maltaise. Le dirigeant reçoit 65 €, et Malte lui rembourse 6/7e de 35 € = 30 € après coup. Donc en poche, il a 65 + 30 = 95 €. Il doit déclarer 95 € en France et acquitter PFU 12,8% (12,16 €) + 17,2% (16,34 €).
Net perçu : 66,5 € environ (95 – 28,5 de PFU total).
Coût global : Sur 100, impôts nets = 35 – 30 remboursé + 28,5 = 33,5 €. C’est très efficace, seulement ~33,5% de prélèvements effectifs.
Risques : Élevé si mal structuré. Le montage doit être solide : réel transfert de propriété de la marque à Malte, substance (un vrai siège maltais qui gère l’IP, éventuellement un employé ou administrateur local), montant de la royalty cohérent. Sinon, le fisc français y verra un transfert artificiel de bénéfices. En cas de contrôle, possible requalification en abus de droit avec rappel de l’IS 25% sur les 100 € (dû par la société française) et imposition du dirigeant si les 95 € lui sont attribués (avec pénalités). Cependant, fait dans les règles, ce montage est légal (Malte est UE, la convention permet le crédit d’impôt). Le niveau de risque dépend beaucoup de la capacité à défendre la réalité économique (la marque a de la valeur, Malte apporte un plus dans sa gestion, etc.).
Conclusion : L’économie fiscale est substantielle (gain +14 € net par rapport au dividende France sur 100 €). Ce montage convient à des groupes plus importants ou à des dirigeants prêts à investir dans la mise en place sérieuse d’une telle structure (conseils juridiques, frais de gestion à Malte…). Pour une PME familiale, c’est sans doute trop complexe/risky ; pour une scale-up tech avec des actifs IP, cela peut se concevoir.
Société offshore à Dubaï non déclarée – Tentative illégale (à éviter), risque maximal
Mécanisme : Le dirigeant crée une société écran à Dubaï qui facture 100 € de services fictifs à sa société française. Celle-ci déduit 100 € (économie 25 € IS). La société à Dubaï encaisse 100 € net sans impôt. L’argent est ensuite rapatrié discrètement sur le compte personnel du dirigeant (ou dépensé via une carte de débit offshore).
Net perçu : 100 € (sans imposition apparente).
Coût global : 0 € d’impôt (en apparence).
Risques : Catastrophiques. D’abord, l’entreprise française va se faire redresser en cas de contrôle, car 100 € de prestations sans substance = réintégration du bénéfice et amende probable. Ensuite, le montage tombe sous le coup de la fraude fiscale et blanchiment. En cas de découverte, le dirigeant devra rembourser l’IS éludé, payer l’IR sur les sommes (avec intérêts), et risque jusqu’à 80% de pénalités pour manœuvre frauduleusepetite-entreprise.net. Sans compter le risque pénal (le fait de dissimuler intentionnellement des revenus via l’offshore peut mener à des poursuites criminelles). Les avocats fiscalistes mettent en garde : les propriétaires de sociétés offshore s’exposent à des rappels d’impôts avec majorations de 80%avocats-picovschi.com, ainsi qu’à des accusations de fraude et de blanchiment. Ce type de montage n’est pas une optimisation, c’est une évasion illégale.
Conclusion : Le jeu n’en vaut clairement pas la chandellepetite-entreprise.net. Les administrations fiscales internationales coopèrent de plus en plus (échange automatique d’informations bancaires via CRS, etc.). Penser passer “entre les gouttes” avec un compte exotique est illusoire aujourd’hui. Autant profiter des stratégies légales existantes plutôt que de risquer sa carrière et sa liberté.
Études de cas réels : succès et échecs de montages de dirigeants
Il est instructif d’observer certains cas concrets ayant fait l’objet soit de succès reconnus, soit de redressements fiscaux, pour comprendre les limites à ne pas dépasser.
Montage réussi – Holding animatrice internationale : De nombreux groupes familiaux français ont organisé leur expansion via une holding belge ou luxembourgeoise, sans encombre. Par exemple, la famille derrière une ETI industrielle française a créé dans les années 2010 une holding en Belgique (où les plus-values de cession de titres par les particuliers sont exonérées) pour préparer la transmission de l’entreprise. La holding belge détenait l’entreprise française et a permis de vendre une partie des actions avec une fiscalité quasi nulle en Belgique (contre 30% de PFU si les actionnaires les avaient vendues directement en France). Les dirigeants sont restés en France, mais en vendant via la holding, ils ont échappé à l’impôt sur la plus-value, et ont ensuite rapatrié les fonds sous forme de dividendes étalés sur plusieurs années pour optimiser l’IR. Ce montage, public car relaté dans la presse économique, a été validé car préparé suffisamment en amont, avec une présence réelle en Belgique (bureau à Bruxelles et conseil d’administration local) et une raison économique (anticiper la croissance européenne). Le fisc n’y a pas vu d’abus de droit, démontrant qu’en respectant les règles, l’optimisation internationale peut porter ses fruits.
Montage litigieux – Affaire Wendel-Editis : Un exemple célèbre de requalification concerne les cadres dirigeants du groupe Wendel. Dans les années 2000, ceux-ci ont mis en place un management package sophistiqué via des holdings au Luxembourg, leur ayant permis de réaliser de très importants gains taxés comme des plus-values. L’administration française a contesté le schéma en le qualifiant de montage artificiel. Après une longue bataille juridique, le Conseil d’État, dans un arrêt de janvier 2022, a confirmé l’abus de droit fiscal en l’espèceactu-juridique.fr. Le montage transfrontalier a été jugé artificiel et motivé principalement par l’évitement de l’impôt. Conséquence : les gains initialement traités en plus-values (30% d’impôt) ont été requalifiés en salaires (avec imposition pouvant dépasser 45% + cotisations). L’affaire Wendel a agi comme un électrochoc dans la communauté des fiscalistes. C’est suite à ce cas que la loi a été ajustée en 2025 pour clarifier la frontière entre plus-value et salaire dans les management packages. Leçon : même des montages élaborés, validés par de grands cabinets, peuvent tomber si le fisc démontre l’intention principalement fiscale et l’artificialité (ici, utilisation d’entités luxembourgeoises sans substance suffisante).
Requalification de management fees : On peut citer un cas (anonymisé dans la jurisprudence) d’une holding française qui facturait annuellement des “management fees” forfaitaires à ses filiales, sans véritable détail ni justification. La Cour administrative d’appel de Paris, en 2018, a confirmé le redressement de l’administration qui avait refusé la déduction de ces factures dans les filialeslla-avocats.fr. Faute de preuves de services rendus, la facturation a été considérée comme une pure remontée de dividendes déguisée. Ici, ce n’était pas international (holding française), mais l’enseignement s’applique pareil : toute facturation intragroupe doit être appuyée par des éléments concrets (rapports d’activité, contrats de prestation, etc.). Sinon, le fisc la traite en distribution occulte taxable.
Erreur fréquente – Dirigeant “exilé” en apparence : Un autre cas courant est celui du faux expatrié. Par exemple, un entrepreneur déclare son domicile fiscal à l’étranger (Belgique, Portugal, Dubai…) pour échapper à l’IR français, mais continue de gérer ses affaires majoritairement depuis la France. L’administration peut alors démontrer que le centre des intérêts économiques (et souvent familiaux) reste en France et considérer qu’il est toujours résident fiscal français. Un cas notoire est celui d’un gestionnaire de fonds parti à Londres mais passant plus de 6 mois par an en France où se trouvait sa famille : il a été redressé comme résident français. De même, les tribunaux ont donné raison au fisc pour des dirigeants prétendument installés en Belgique, mais dont l’essentiel de la gestion d’entreprise se faisait depuis la France (dossiers des “faux exilés” des années 2010). Moralité : L’expatriation fiscale est une solution radicale mais qui doit être sincère et totale, sinon elle peut être désavouée avec effet rétroactif (rattrapage de tous les impôts “éludés” comme s’il n’était jamais parti).
Pièges fréquents et risques de requalification
Mal conçue, une stratégie de rémunération internationale peut tourner au cauchemar. Voici les erreurs à éviter et les risques juridiques majeurs auxquels s’exposent les dirigeants imprudents :
Montages artificiels sans substance : C’est l’ennemi n°1. Créer une société offshore ou même européenne qui n’a ni employés, ni bureaux, ni dépenses autres que des flux financiers, est un signal rouge pour le fisc. Un montage purement artificiel dans le but principal de réduire l’impôt sera qualifié d’abus de droit (Article L64 du LPF). La conséquence : l’administration peut l’ignorer et réimposer comme si le montage n’avait pas existé, avec une pénalité de 80% pour abus de droit délibéré. Il ne suffit pas qu’une structure existe sur le papier dans un paradis fiscal, il faut pouvoir prouver sa substance économique (activité réelle, gestion depuis ce pays, etc.)avocats-picovschi.comavocats-picovschi.com.
*Sous-estimer la notion d’établissement stable : Si vous dirigez depuis la France une entreprise théoriquement étrangère, vous risquez de créer un établissement stable en France de cette entreprise. Par exemple, vous montez une société en Estonie mais toute la négociation des contrats et le management se fait depuis votre bureau à Paris : le fisc peut considérer que l’entreprise estonienne exerce en fait une activité en France via un établissement stable non déclaré. Les conséquences : taxation en France des profits attribuables à cet établissement, potentielles amendes pour non-déclaration, et fin des avantages espérés du montage. Pour éviter cela, il faut que les décisions clés et la gestion quotidienne de la société étrangère se passent sur place ou depuis l’étranger (ex : avoir un directeur local, ou que le dirigeant français voyage fréquemment et puisse justifier que les actes de gestion sont réalisés hors de France).
Transfert indirect de bénéfices (prix de transfert) : Toute transaction entre une entité française et une entité liée étrangère doit se faire à un prix de marché. C’est le principe des prix de transfert. Si une filiale française paie 1 000 000 € de “frais de gestion” à sa maison-mère aux Îles Caïmans pour deux pauvres présentations PowerPoint, l’administration réintégrera tout excès en estimant que le prix normal de la prestation aurait été par exemple 50 000 €. L’article 57 du CGI permet de rectifier les bénéfices en cas de transfert de bénéfices à l’étranger via des conditions anormales. Le dirigeant doit donc veiller à documenter les prestations et leur valorisation. Ce principe vaut pour les management fees, les redevances, les prix de biens vendus intra-groupe, etc. Pour les PME/ETI, depuis 2019, il y a obligation de préparer une documentation de prix de transfert si le chiffre d’affaires ou total bilan excède 50 M€ (ou si filiale dans un paradis fiscal). Même en deçà, en cas de contrôle, il faudra justifier les méthodes de calcul.
Mauvaise qualification des revenus : Tenter de faire passer un revenu de nature salariale pour un dividende ou une plus-value est risqué. Par exemple, un dirigeant se fait racheter sa propre entreprise par une holding qu’il contrôle pour empocher une somme taxée en plus-value (30%) au lieu de se verser des rémunérations sur plusieurs années – le fisc peut y voir un abus de droit si l’objectif est uniquement de convertir du revenu en capital. De même, distribuer tous les ans presque tout le bénéfice en dividendes à un dirigeant-associé qui n’a aucun salaire peut attirer l’attention : l’administration pourrait arguer que le dividende compense en réalité un travail de dirigeant et aurait dû être en partie un salaire (c’est rare, mais dans des cas extrêmes de très faible rémunération et dividendes énormes, c’est discutable). La frontière est parfois fine, notamment avec les management packages où, comme on l’a vu, la loi a dû clarifier pour éviter que des salaires déguisés en gains en capital ne passent sous le radardelcade.com.
Non-respect des obligations déclaratives internationales : Avoir des entités ou comptes à l’étranger implique des déclarations spécifiques en France. Par exemple, le formulaire CERFA 3916 pour déclarer les comptes bancaires ou actifs numériques à l’étranger, l’obligation de déclarer les trusts (formulaire 2181-TRUST) si un trust est utilisé, ou la déclaration des participations dans des entités étrangères (imprimé 5471-SD) en cas de détention > 10% notamment. Omettre ces déclarations est en soi sanctionnable (amendes fixes pouvant aller jusqu’à 1 500 € par compte non déclaré, et 10 000 € si le compte est dans un pays non coopératif). Ce n’est pas qu’une formalité : le fisc recoupe ces infos avec les données échangées par les banques étrangères. Ne pas déclarer un compte à Dubaï ou au Luxembourg est non seulement illégal mais augmente la suspicion de fraude. Un dirigeant avisé doit jouer cartes sur table : déclarer ses montages légaux, c’est un gage de bonne foi.
Conseils mal avisés et arnaques : Enfin, un risque souvent sous-estimé est de tomber sur de mauvais conseillers. Sur Internet pullulent les offres de créations de sociétés offshore “clés en main” pour quelques centaines d’euros, promettant monts et merveilles. Beaucoup de ces prestataires peu scrupuleux disparaissent en cas de problème et laissent le dirigeant seul face à l’administrationpetite-entreprise.netpetite-entreprise.net. L’approximation dans la maîtrise du droit fiscal de ces intermédiaires a conduit des entrepreneurs dans le mur. Il est essentiel de faire appel à des avocats fiscalistes ou experts-comptables compétents et réputés, surtout pour des montages internationaux complexes. Le coût est plus élevé, mais c’est sans comparaison avec les risques encourus avec une structure bricolée sur un coin de table.
Recommandations pour une rémunération internationale optimisée et pérenne
Pour conclure, voici quelques conseils concrets à destination des entrepreneurs souhaitant optimiser leur rémunération via l’international, tout en dormant sur leurs deux oreilles :
Mixer intelligemment les formes de revenus : La solution idéale n’est rarement monolithique. Souvent, un panachage est gagnant : un salaire suffisant pour la protection sociale de base (et éviter l’illusion d’un travail non rémunéré), des dividendes réguliers pour profiter du PFU, éventuellement un management package pour capturer la hausse de valeur de l’entreprise, et le tout complété par des montages internationaux ciblés (royalties, management fees) si pertinent. Diversifier, c’est aussi répartir les risques et éviter d’attirer l’attention sur un flux unique trop important.
Choisir la bonne juridiction pour les bonnes raisons : Si vous envisagez une holding ou entité à l’étranger, sélectionnez le pays en fonction de critères business d’abord (emplacement stratégique, facilité administrative, réseau bancaire, stabilité juridique) en plus de la fiscalité. Par exemple, le Luxembourg pour une holding européenne multi-filiales, l’Irlande pour une société détenant des logiciels destinés au marché mondial anglophone, la Suisse pour une base de conseil financier avec proximité de clients internationaux, Dubaï éventuellement si votre activité vise le Moyen-Orient ou si vous comptez vous y installer… Un montage a plus de chances d’être respecté par le fisc s’il a une logique économique évidente en dehors des seuls impôts.
Veiller à la substance et à la réalité économique : C’est le maître-mot. Toute structure ou flux implémenté doit pouvoir passer le test du “Ça a du sens”. Ouvrez un bureau, même modeste, dans le pays choisi, tenez-y des réunions, ayez-y une adresse professionnelle. Employez du personnel local si possible, ou a minima un service de domiciliation sérieux avec secrétariat. Documentez le travail effectué : rapports de conseil, contrats de licence en bonne et due forme, comptes-rendus de meetings. En cas de contrôle, pouvoir montrer des factures détaillées, des emails de travail, des déplacements sur place, fera toute la différence entre un montage vu comme abusif ou légitime.
Conserver une cohérence rémunération vs. train de vie : L’administration compare souvent le train de vie du dirigeant (patrimoine, dépenses visibles) et ce qu’il déclare officiellement. Si vous vous versez seulement 20 000 € par an en France mais qu’on vous voit rouler en Bentley et que votre start-up lève des millions, cela peut susciter des questions. Donc, même si la majorité de vos revenus viennent de structures étrangères faiblement taxées, envisagez de remonter une partie en France de manière régulière (via des dividendes déclarés) pour rester cohérent. Payer une certaine contribution fiscale en France réduit la probabilité d’un contrôle agressif sur le reste.
S’entourer de conseils locaux et suivre les évolutions : Les lois fiscales changent vite, tant en France qu’à l’étranger. Ce qui est valide aujourd’hui (par ex. le régime maltais) peut évoluer sous la pression internationale. Entourez-vous d’un réseau de conseils : un expert-comptable/fiscaliste en France et un conseiller fiscal dans chaque pays clé où vous avez une structure. Ils vous alerteront en cas de changement législatif nécessitant une adaptation. Par exemple, l’instauration de l’impôt minimum OCDE de 15% pour les grands groupes pourrait à terme impacter certains avantages (même si PME/ETI ne sont pas directement visées pour le moment). De même, la France durcit régulièrement son arsenal anti-évasion (comme la récente taxation des management packages). Restez informé pour ajuster votre montage en temps voulu, plutôt que de le découvrir lors d’un contrôle.
Documenter et sécuriser par anticipation : N’hésitez pas à faire valider vos schémas par la procédure du rescrit fiscal si vous le jugez utile. Un rescrit (demande à l’administration de se prononcer sur un montage décrit) peut apporter une sécurité juridique précieuse, même si cela prend du temps et dévoile vos intentions (en général, on y a recours pour des montants ou enjeux très importants). À défaut, préparez en interne un dossier de défense de votre montage : organigrammes, notes explicatives sur le rôle de chaque entité, étude de prix de transfert par un expert pour les management fees/royalties… Vous aurez alors tous les éléments en main pour répondre efficacement en cas de contrôle, ce qui découragera peut-être le fisc de remettre en cause s’il voit que tout a été fait sérieusement.
Ne pas abuser des bonnes choses : L’optimisation fiscale est un art de l’équilibre. Si vous poussez tous les curseurs dans le rouge (0 € de bénéfice en France, 100% des revenus cash logés à l’étranger, aucune impasse fiscale pour le Trésor public), vous devenez une cible de choix. Parfois, laisser un peu de matière imposable en France ou payer “volontairement” un peu plus de charges sociales (ex : en prenant un salaire raisonnable) est un investissement en tranquillité. C’est cynique, mais vrai : un montage trop parfait fiscalement sera perçu comme suspect. Tandis qu’un dirigeant qui paie, disons, ses 30% de PFU sur une partie de revenus en France, contribue déjà de manière non négligeable – ce qui peut inciter le fisc à concentrer ses efforts sur des cas plus flagrants.
En appliquant ces recommandations, un dirigeant peut espérer profiter des meilleures opportunités internationales tout en minimisant les risques. L’objectif n’est pas d’éliminer l’impôt (mission impossible et illégale) mais de le réduire dans le cadre de la loi, en utilisant intelligemment la liberté d’établissement et les différents régimes existants. Lorsque c’est fait avec rigueur et transparence, “se rémunérer intelligemment à l’international” devient non seulement possible, mais parfaitement défendable en cas de contrôle.
Conclusion
Structurer sa rémunération internationale est un exercice complexe qui mêle optimisation fiscale, gestion d’entreprise et respect scrupuleux du droit. Les leviers – dividendes, management fees, redevances, stock-options – offrent des bénéfices substantiels en termes de trésorerie nette pour le dirigeant, à condition d’en maîtriser la fiscalité et de connaître les lignes rouges à ne pas franchir. Les exemples et comparaisons présentés montrent qu’il existe une palette de solutions légales pour alléger la pression fiscale sur un dirigeant résident en France, notamment via l’implantation de structures dans des pays au régime plus favorable.
Cependant, chaque avantage s’accompagne de son lot de responsabilités : justification des montages, obligations déclaratives, substance économique réelle... En somme, l’optimisation internationale requiert une approche professionnelle et éthique. Un entrepreneur avisé traitera ce domaine avec autant de sérieux que le développement de son business, s’entourant d’experts et adoptant une stratégie de conformité proactive. À la clé, il pourra jouir d’une rémunération optimisée, préservant sa richesse et celle de son entreprise, tout en gardant l’esprit tranquille quant à la pérennité et la légalité de son montage.
En final, “se rémunérer intelligemment à l’international” revient à faire jouer la concurrence fiscale entre États dans le respect des règles, un peu comme on fait jouer la concurrence entre fournisseurs – c’est agir en bon gestionnaire. L’État français accepte l’optimisation dans la mesure où elle s’inscrit dans le cadre légal (et non dans sa marge interdite). À vous, dirigeants, d’en user judicieusement pour maximiser vos gains sans compromettre la sérénité de votre parcours entrepreneurial.
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